Hydrodynamique en Natation
     
      Voici une intéressante étude de Germon Céline et Ivanic Tanja, étudiantes en Maîtrise de Mécanique à Poitiers, proposée ici résumée par Laurent-Emmanuel Brizzi (merci à eux pour ce travail). On y analyse certaines des forces qui entrent en jeu dans le processus d'avancement du nageur.
       
      Le sujet est complexe, et l'éclairage partiel, mais cela donne déjà une bonne première idée de la problématique...
       
     
    Objectif et définitions
      
    Cette étude a pour objectif de traiter les phénomènes physiques permettant l'avancement du nageur dans le milieu aquatique.  
      
    Avec cette définition, deux mots-clés s'imposent à l'esprit : hydrodynamique et natation.  
     
    • Hydrodynamique : partie de la mécanique des fluides qui s'applique aux liquides, étudie les lois régissant leurs mouvements et les résistances qu'ils opposent aux corps qui se meuvent par rapport à eux. 
    • Natation : action de nager, en tant qu'exercice, en tant que sport. 
     
     
    Historique
      
    La natation sportive est apparue il y a cent cinquante ans environ. Bien que la natation ne soit pas au programme des Jeux Olympiques de l'Antiquité, elle était connue des Anciens. Peu avant notre ère, se déroulèrent également au Japon des compétitions de natation. Le Japon devait être le premier pays à instituer une organisation nationale de la natation sportive. 

    Cette discipline s'installe en Europe au XIXème siècle. En 1837, les premières courses de natation sont organisées à Londres, mais c'est en Australie en 1846 que se déroule le premier championnat, et en 1858 la première rencontre à caractère internatonal, baptisée : championnat du monde. 

    Lors de la seconde moitié du XIXème siècle, on cherche le mode de nage le plus efficace. 

    Les premières épreuves Olympiques de natation se déroulent à Athènes en 1896. Les premières épreuves féminines sont ajoutées à l'occasion des Jeux Olympiques de Stockholm en 1912. 
     

     
    Propriétés physico-chimiques de l'eau
      
    Dureté : L'eau naturelle possède une certaine dureté dûe à la présence de sels de calcium ou de magnésium. Cette présence est mesurée au travers du degré hydrotimétrique (DH). Les particules en suspension font intervenir des forces de rugosité non négligeables car elles perturbent l'écoulement de l'eau le long du corps du nageur. On aura donc intérêt, pour les eaux des bassins, à utiliser des eaux ayant un DH faible. 

    Densité : La flottabilité du nageur croît avec la densité de l'eau. La densité de l'eau "douce" augmente avec la diminution de la température. Celle-ci ne pouvant varier qu'entre 25 et 27°C, la seule façon d'augmenter la densité sans accentuer la dureté est de faire un mélange avec de l'eau de mer, ce qui est strictement interdit en compétition. 

    Viscosité : Le coefficient de viscosité dynamique dépend de la nature du fluide et de la température : il diminue avec l'augmentation de celle-ci ; or, dans ce cas, la densité chute. Il faut donc trouver un rapport densité/viscosité le plus faible possible. Ce rapport se situe autour de 25°C. 
     

     
    Résistance à l'avancement
      
    1- Traînée de forme 

    Ce sont les résistances à l'avancement liées à la position du corps qui est plus ou moins horizontal et aux mouvements verticaux et latéraux qui font occuper au corps plus d'espace. Les écoulements laminaires sont détruits, les résistances frontales augmentées, les traînées tourbillonnaires de succions postérieures également. Ces deux phénomènes sont entièrement liés. Pour réduire cette résistance à l'avancement provoquée par cette traînée de forme, il faut essayer de trouver la position la plus horizontale possible en rapport avec la technique de nage utilisée. 

    La forme du nageur joue un rôle important : il doit orienter son corps de telle sorte que tous ses contours aillent progressivement en diminuant vers l'arrière, tandis qu'il présente la surface la plus petite possible à l'eau devant lui. 

    Si deux corps ont la même épaisseur, le plus court offrira plus de résistance à l'avancement. 

    Un corps ayant une épaisseur maximale reculée provoque plus de remous à l'arrière que le même corps orienté en sens inverse. 

    Un nageur long ayant de larges épaules et un bassin étroit offre moins de résistance à l'avancement. 

    2- Traînée de vagues 

    Le nageur se déplace à la surface de l'eau à la limite de deux milieux, l'eau et l'air. Son déplacement crée des vagues qui sont plus ou moins importantes en fonction de sa vitesse, de sa forme, des mouvements latéraux et verticaux. La vague frontale crée une zone de haute pression devant le nageur qui le freine et qu'il va devoir traverser. Les vagues arrières présentent les mêmes effets de basses pressions et de succions que la traînée de forme. 
     
    Cependant si dans le cas de la traînée de forme, la résistance est égale au carré de la vitesse, dans le cas de la traînée de vagues, la résistance est d'après Maglischo égale au cube du carré de la vitesse. Dans un bon bassin et avec de bonnes lignes d'eau brise-vagues, les vagues extérieures au nageur et celles qui s'éloignent de lui sont réduites. 

    3- Traînée de frottement 

    Le frottement entre la peau du nageur et l'eau fait que le nageur entraîne avec lui quelques molécules d'eau. Ces molécules entrent en collision avec d'autres immédiatement en avant d'elles et rebondissent dans des directions aléatoires. Ces molécules pénètrent dans les flux adjacents provoquant une turbulence qui va en s'élargissant et qui augmente la traînée. 

    Les principaux facteurs qui influencent l'importance de la traînée par frottement que subissent les nageurs sont : leur surface de frottement, leur vitesse et la rugosité de leur surface corporelle. Les nageurs ne peuvent pas influencer leur surface corporelle ; ils ne peuvent jouer sur leur vitesse qu'en choisissant le bon train dans la partie initiale de la course. Celle-ci signifie que la seule possibilité de réduire significativement leur traînée de frottement est de régulariser la surface de friction. 
     

     
    Propulsion
      
    1- Approche théorique 

    Il existe de nombreuses théories à ce sujet, mais aucune d'entre elles n'a pu être démontrée. 

    De nombreux experts acceptent le théorème de Bernoulli comme la base de la propulsion en natation. Même si c'est certainement la théorie la plus couramment admise, ce n'est probablement pas la principale loi physique que les nageurs utilisent pour propulser leur corps en avant. 
      
    Tandis que le théorème de Bernoulli contribue de manière accessoire à la propulsion, le mécanisme propulsif principal que les nageurs utilisent est probablement basé sur la troisième loi du mouvement de Newton. Il s'agit de la loi liant l'action et la réaction, qui peut être exprimée de la manière suivante : quand les nageurs poussent l'eau en arrière d'eux, ils accélèrent vers l'avant avec une force de même grandeur.  
      
    La principale raison qui a fait rejeter la loi action-réaction de Newton en faveur du théorème de Bernoulli est probablement l'étude de Brown et Counsilman (1971). Ils ont montré que les nageurs se propulsaient plutôt par des mouvements en diagonale que par des mouvements dirigés vers l'arrière, ce qui a conduit à chercher une autre explication pour la propulsion en natation. Malheureusement, on a mal interprété le principe de la loi de Newton en pensant que les nageurs devaient pousser avec leurs bras et leurs jambes directement vers l'arrière pour pousser l'eau vers l'arrière. On n'a pas réalisé qu'ils pouvaient pousser l'eau vers l'arrière très efficacement, même en propulsant dans des directions diagonales.  
      
    La base de la propulsion, d'après le théorème de Bernoulli, est que les mains des nageurs sont utilisées comme des ailes. Quand l'eau s'écoule au-dessus d'elles, elle circule plus vite au-dessus du côté dorsal qu'au-dessous du côté palmaire. Ceci crée une différence de pression entre la face palmaire et la face dorsale qui produit une force ascensionnelle. Quand cette force se combine avec la force de traînée agissant sur la main, elles produisent une force qui propulse le corps du nageur en avant. 

    S'il est très probable que les forces ascensionnelle et résultante sont produites effectivement quand le nageur pousse en diagonale, la grandeur de ces forces est probablement d'avantage liée à l'angle d'attaque. 

    2- Angle d'attaque  

    L'orientation et surtout les angles d'attaque des mains et des pieds dans le mouvement des bras et des jambes seront déterminants pour orienter au mieux la résultante propulsive des forces qui y participent.  
    Le mouvement des mains et des pieds, dans le cadre général de celui des bras et des jambes, se rapproche de celui de l'hélice pour une recherche de bons appuis avec :  

    • Une recherche permanente d'eau inerte, 
    • Une recherche des meilleurs angles possibles, 
    • Une adaptation de la forme des mains pour mieux déplacer vers l'arrière les flux d'eau créés. 
    L'efficacité de la propulsion dans l'eau d'après Counsilman sera meilleure en déplaçant vers l'arrière une grande masse d'eau sur une courte distance plutôt qu'une petite sur une grande distance. 

    L'efficacité sera maximale en créant à l'avant des mains des zones de basse pression (dépression) qui attirent, et en arrière des zones de haute pression (surpression) qui repoussent, sur une grande masse d'eau avec un mouvement des mains et un écoulement laminaire des fluides qui ne seront de ce fait jamais perpendiculaires à l'avancement. 
      
    C'est l'utilisation de cet ancrage de la main dans de grandes masses d'eau inertes qui orientera vers l'arrière les flux créés qui permettra de maintenir ou d'accélérer le déplacement du corps dans l'eau. 
      

     
     
     
    Les mains et les bras sur lesquels s'appliquent ces forces ne peuvent aller vers l'avant, elles se transmettent au corps du nageur en suspension dans l'eau grâce à la fixation des épaules et du coude et le propulsent par dessus les appuis comme un bateau est propulsé par l'hélice qui lui est fixée à la coque. 

    Les mains en appui sur de grandes masses d'eau sortent près de l'endroit où elles sont entrées. 

    Les angles d'attaque pourraient se situer entre 0 et 90°. Cependant: 

    • avec des angles trop petits, l'eau n'est pas suffisamment défléchie vers l'arrière et les différences de pression ne sont pas suffisantes pour créer une force de portance utile. 
    • avec des angles trop grands, la main devient une rame, l'eau n'est pas non plus correctement défléchie, la traînée est trop importante, des turbulences se produisent sur le dos de la main, les différences de pression et la portance mauvaise en sont affectées, le sens d'application des forces n'est pas favorable à l'avancement.
     
     
    Conclusion
      
    En effectuant ces recherches, nous nous sommes rendues compte que malgré de nombreuses études réalisées par différentes personnes, jusqu'à présent, tous les phénomènes permettant au nageur de se déplacer n'ont pas été totalement expliqués. Selon nous, ceci est dû à la complexité et à la multitude des forces appliquées. Une partie d'entre elles est réunie dans le schéma suivant : 
      
     
     
      
     
     
    Source : http://sfa.univ-poitiers.fr/commedia/meca/natation/synthese.html