L'indice de coordination sur les nages assymétriques ventrales
    Titre complet : UTILISATION D’UN INDEX POUR EVALUER LA COORDINATION EN CRAWL

    Vous avez sourié en lisant le titre principal ? Bravo, vous y avez décelé la discrète petite pointe d'humour. Voici une étude très intéressante de l'iuf Grenoble, technique mais pointu et instructive... 
     

       
       
        
      Introduction
       
      La logique de l'efficacité en crawl est d'alterner les actions propulsives des deux bras dans le but d'éviter les temps morts moteurs.

      Pourtant trois sortes de coordinations peuvent être distinguées, 

      • la plus logique est la coordination en “ opposition ” : au moment où un bras a terminé sa poussée, l'autre bras démarre sa traction. 
      • La coordination la plus discontinue, en “ rattrapé ” correspond à un temps mort d'un bras pendant la phase propulsive de l'autre bras. 
      • La troisième coordination en “ superposition ” présente une simultanéité de la fin de la poussée d'un bras avec le début de traction de l'autre. 
      Pour évaluer la succession de cette propulsion de bras, un index de coordination (IdC) a été créé (Chollet et al, 2000). Cet index, assimilé à un curseur évoluant sur une échelle numérique est calculé en pourcentage du temps total du cycle.
      • IdC est nul lorsque la coordination est dite en opposition.
      • IdC est positif lorsque la coordination est dite en superposition d'action des bras.
      • IdC est négatif lorsque la coordination est dite en rattrapé.
      L’objet de cette présentation est de montrer les différents résultats expérimentaux au cours de 5 études qui utilisent cet index :

      (1) effets de la vitesse de nage et du niveau de performance de crawleurs nationaux (Chollet et al , 2000) ;
      (2) comparaison entre les coordinations de triathlètes et de nageurs (Millet et al, soumis) ;
      (3) effets du port de la combinaison sur les coordinations de nage chez les triathlètes (Benavente, 1997) ;
      (4) modifications des coordinations liées à l’utilisation ou pas de plaquettes de nage (Sidney et al, 2000) ;
      (5) transitions de coordination de nage chez des experts en crawl lorsqu’on accroît les résistances à l’avancement en nage attachée (Seifert et al, 2001). 
        

       
       
        
      Méthode
       
      Chaque étude a concerné une population et une procédure spécifiques :

      (1) 43 nageurs nationaux divisés en trois groupes selon leur niveau de performance sur 3 allures : celles du 800 m (V800), du 100 m (V100) et du 50 m (V50).

      (2) 19 triahlètes internationaux sont comparés à 15 nageurs internationaux ou nationaux sur des parcours allant de 80% à 100% de leur vitesse maximale.

      (3) 12 triathlètes nationaux sur 3 allures de nage : V800, V100 et à vitesse maximum (Vmax) portant ou pas une combinaison de natation (habituellement utilisées par les sujets).

      (4) 8 nageurs nationaux réalisent 2x25m à Vitesse Maximale Aérobie, préalablement déterminée, une fois avec et une fois sans plaquettes (dans un ordre randomisé).

      (5) 5 crawleurs de niveau national nageant sur place en étant relié à un élastique équipé d’un dynamomètre et d'un enrouleur qui impose en continu 5 paliers de résistances croissantes de 50% à 90% de la force maximale du nageur.
       

       
       
        
      Résulats
       
      (1) En moyenne, l’index de coordination (IdC) a été de -3.9±6.3% pour l'ensemble des nageurs étudiés. IdC a augmenté avec l’allure : V800=-7.6%; V100=-3.2%; V50=-0.9% et le niveau de performance : G3 (faible)=-6.1%; G2=-3.9%; G1 (fort)=-1.8% pour la moyenne des 3 vitesses. Les 2 valeurs extrêmes sont G3V800=-9.4±5.4% et G1V50=+2.5±4.4%.
       
      (2) l’IdC moyen des 6 vitesses des nageurs (-2.9±5.1%) n’est pas significativement différent de celui des triathlètes (-1.9±5.6%). Alors que l’IdC des nageurs évolue progressivement avec l’augmentation de la vitesse, celui des triathlètes régressent entre 98 et 100% de leur vitesse maximale (IdCtri = -1.7% versus IdCnag = +2.3% : p<0.005).
       
      (3) Une supériorité (p<0.05) dans la condition de nage avec combinaison (comb) de l’IdC à V800 (-11.7±3.7%) pour -9.6±3.6% sans comb. A l’allure du 100m ces différences (IdC comb = -7.2±3.7% pour -5.1 ± 4.4% sans comb) ne sont pas significatives.

      (4) L’index de coordination avec plaquettes : -1±4% est significativement plus faible (p<0.05) qu’en condition normale : -5±4%.

      (5) En moyenne, l’IdC est de -0.41±3.99%. Il change (p<0.05) progressivement de -2.3% au palier 1 (50% de la force
      maximale) à +1.6% au palier 5 (90% de Fmax).. 
       

       
       
        
      Discussion
       
      (1) Avec l'augmentation de la vitesse et du niveau de pratique, les nageurs modifient la coordination des mouvement de bras. Ils passent d’un “ rattrapé-avant ” en demi-fond à une coordination en “ opposition ” voire en " superposition " en sprint. Cette adaptation est d’autant plus marquée que les nageurs sont performants démontrant une plus grande capacité d’adaption technique aux contraintes, notamment biomécaniques, de l’épreuve.
       
      (2) Les triathlètes internationaux ont une logique comparable à celle des nageurs nationaux sauf dans la zone des vitesses très élevées qui ne leur sont pas familière alors leur adaptation est logiquement moins bonne que celle des nageurs.
       
      (3) Bien que volontairement la vitesse de nage avec et sans combinaison n'est pas différente sur l'ensemble des allures, l'index de coordination avec combinaison supérieur à l’allure du 800m signifie qu'il y a une plus grande glisse dans la nage avec la combinaison due à une augmentation de la flottabilité qui permet de réduire les résistances à l'avancement.
       
      (4) L'index de coordination augmente avec l’évolution de la vitesse mais également avec les plaquettes. Ce dernier résultat est principalement expliqué par une amélioration de la propulsion des membres supérieurs du à l’augmentation des surfaces propulsives qui permet des appuis sur des masses d’eau plus conséquentes.
       
      (5) Avec l’incrémentation des résistances à l’avancement, l’IdC augmente donc significativement. Le passage progressif du rattrapé à la superposition, s’explique principalement par le fait qu’en situation attaché, même lorsque les résistances ne sont qu’à 90% de la force maximale, les freinages sont bien plus important que dans la nage normale.

      Une “ lecture de l’approche dynamique ” peut également être proposé pour discuter ces résultats comme pour l’étude (1)
      (Delignières et Chollet, 1999). Dans cette interprétation, les coordinations apparaissent comme des phénomènes émergeant du jeu des contraintes qui pèsent sur le système.
       

       
       
        
      Conclusion
       
      La coordination des mouvements de bras est modifiée avec les résistances à l’avancement, que celles-ci progressent naturellement avec l’augmentation de la vitesse (R=KSV2) ou artificiellement par le fait d’être attaché. 
       
      Le cas inverse de réduction des résistances grâce au port d’une combinaison ou une amélioration de la propulsion par l’utilisation de plaquettes fait également évoluer dans le sens inverse cette coordination.
       
      L’index de coordination, outil de quantification de cette évolution, montre son intérêt par la mesure précise de ces variations.... 
       
       

      Source :

      iuf Grenoble - http://www.ujf-grenoble.fr/ufraps/acaps/Actes/Poster/chollet.pdf

      Références :

      BENAVENTE H. (1997). Comparaison des coordinations de nage de triathlètes et de nageurs. Conséquences du port de la combinaison de natation. Mémoire
      de DEA Université de Montpellier1.

      CHOLLET D., CHALIES S. & CHATARD J.C. (2000). A new index of coordination for the crawl : description and usefullness. Int J Sport Med, 20, 1-6.

      DELIGNIERES D.& CHOLLET D. (1999). Quelques idées neuves sur les coordinations en natation. pp15-26, Actes des 2èmes journées spécialisées de
      Natation. Liévin.

      MILLET G., CHOLLET D. CHALIES S. & CHATARD J.C. (soumis) Comparison of coordination in front crawl between elite swimmers and triathletes. Int J
      Sport Med.

      SEIFERT L., ERNWEIN V., SCHNITZLER C. & CHOLLET D. (2001).Effets des résistances sur la rupture de pattern en crawl lors d’un protocole continu en
      nage attachée. Congrès ACAPS. Valence.

      SIDNEY M., PAILLETTE S., HESPEL J.M., CHOLLET D. & PELAYO P. (2001). Swim paddles modify the intra-cyclic velocity variations and the arm
      coordination in front crawl stroke. ISBS. San Francisco.